Cette formation est à destination des orthophonistes libéraux. Elle s'inscrit dans le cadre de l'amélioration des pratiques et de l'approfondissement des connaissances des pratiques diagnostiques et des prises en charge thérapeutiques des patients présentant des troubles du langage écrit.
Cette formation s'appuie d'une part sur les apports théoriques de la gestion mentale, outil métacognitif permettant de décrire les processus cognitifs conscients du sujet, et d'autre part sur les modèles neuropsychologiques du fonctionnement de la lecture et de l'orthographe qui permettent un descriptif des signes cliniques des troubles du langage écrit.
Les techniques rééducatives de l'orthographe à la disposition des orthophonistes découlent de différentes approches: approche en psychologie cognitive (modèles neuropsychologiques), approche instrumentale, approche langagière, entre autres. Ce panel de méthodes nous permet, en fonction de notre patient, de ses symptômes, de notre connaissance des outils, de notre expérience clinique, d'adapter notre démarche thérapeutique. Au sein de cette démarche, la gestion mentale, outil métacognitif, permet d'affiner l'adaptation des méthodes rééducatives aux particularités cognitives du patient. Elle donne aussi au patient la possibilité de s'impliquer de façon efficiente dans sa rééducation.
Cette formation d'approfondissement s'adresse à des orthophonistes déjà formés aux aspects théoriques de la gestion mentale dans le cadre d'une formation initiale rééducation orthophonique et gestion mentale.
• Contenu de l'action:
Cette formation d’approfondissement exploite les acquis d'une formation initiale à la gestion mentale appliqués à la rééducation de l'orthographe.
Appuis théoriques:
Concernant le gestion mentale, le contenu de l'action s'appuie sur les bases théoriques développées par Antoine de la Garanderie enseignant et chercheur. Ses découvertes concernent les processus de notre pensée consciente. Elles ont été utilisées en premier lieu par des enseignants dans le domaine de la pédagogie mais elles ne concernent pas que les apprentissages et la pédagogie: les processus de la pensée consciente sont au cœur et à la source de toutes nos activités mentales. Leur connaissance est donc extrêmement utile pour d'autres professionnels, en particulier dans les domaines de la santé et de la rééducation. Les rééducateurs qui travaillent sur les gestes cognitifs (attention, mémorisation, compréhension, réflexion) et s'attachent à adapter leurs pratiques thérapeutiques aux particularités cognitives de leurs patients (ces particularités étant pour certaines reliées directement à leur pathologie), trouvent dans la gestion mentale un corpus théorique adapté à l'analyse des pathologies et à leur rééducation. C'est un outil supplémentaire qui enrichit des pratiques rééducatives déjà existantes. France Pagès, orthophoniste et formatrice, a développé ce corpus théorique pour les applications qui concernent la rééducation orthophonique.
Concernant l'orthographe et les troubles de l'apprentissage du langage écrit, le contenu de l'action s'appuie sur les modèles neuropsychologiques dits « à double voie » assemblage et adressage. Ceux-ci offrent une description du fonctionnement cognitif de la lecture et de l'orthographe (modèle des procédures orthographiques de Zesiger et de Partz 199
4-. L'atteinte de la voie d'assemblage entraine une dysorthographie phonologique alors que l'atteinte de la voie d'adressage entraîne une dysorthographie lexicale. Ces modèles rendent compte des altérations fonctionnelles multiples à l'écrit dont sont atteints les patients dysorthographiques. Ils participent de l'approche de la psychologie cognitive dans l'élaboration d'outils de rééducation de l'orthographe.
Compétences visées:
S'appuyer sur les connaissances du fonctionnement cognitif conscient de l'individu pour adapter les outils rééducatifs aux particularités cognitives de nos patients.
Concernant la rééducation de l'orthographe, ces compétences se déploient dans les domaines suivants qui reprennent différentes atteintes fonctionnelles observées lors des bilans orthophoniques du langage écrit :
Discriminations auditives et visuelles
Confusions auditives et visuelles
Mémoire visuelle et mémoire auditive
Mémorisation de l'orthographe lexicale
Orthographe phonologique
Orthographe grammaticale.
Descriptif:
• Reprise et approfondissement du corpus théorique de la gestion mentale
• Mise en lien des modèles neuropsychologiques de fonctionnement de la lecture et de l'orthographe à double voies avec la théorie de la gestion mentale
• Description des processus cognitifs conscients qui concernent l'apprentissage de l'orthographe et ceux qui concernent le scripteur expert.
• Analyse des difficultés rencontrées chez les patients dyslexiques ou dysorthographiques en s'appuyant sur le fonctionnement cognitif propre de chaque individu, afin d'approfondir le diagnostic posé lors du bilan orthophonique, et d'adapter la rééducation (outils utilisés, déroulement des séances, plan de rééducation). On travaillera en particulier dans les domaines suivants:
Discriminations auditives et visuelles
Confusions visuelles ou auditives de sons ou de graphies.
Inversions et oublis de sons
Transcription des sons complexes
Gestion de l'ordre des phonèmes
Mémorisation de l'orthographe lexicale
Utilisation des régularités morphologiques pour l'orthographe lexicale
Orthographe grammaticale: homophones, accords, conjugaisons.
• Pratique du dialogue cognitif, en particulier dans le cadre de l'orthographe grammaticale et de l'écriture sous dictée.
• Propositions d'adaptations thérapeutiques possibles selon l'âge de la personne, de l'enfant jusqu'à l'adulte dyslexique.
• Propositions d'adaptations thérapeutiques en fonction des pathologies:
Dyslexies et dysorthographies
Déficiences sensorielles visuelles et/ou auditives
Poly-handicaps.
Méthodes et moyens pédagogiques :
Apports théoriques.
Dialogues animateur/stagiaires sur le contenu théorique, les études de cas.
Exemples en clinique.
Mises en situation: réalisation d'une tâche et dialogue cognitif.
Analyses de cas apportés par les stagiaires.
Supports pédagogiques:
-Présentation PowerPoint
-Supports papiers distribués au fur et à mesure du déroulement de la formation
-Grilles d'évaluation: -questionnaire initial
-questionnaire final
-questionnaire de satisfaction
• Objectifs:
Objectifs généraux:
1. Apprendre à repérer, en amont des signes cliniques de la dysorthographie, les processus cognitifs révélant des étiologies diverses responsables de l'efficience du patient.
Lors du bilan, nous repérons des signes cliniques spécifiques des troubles du langage écrit: atteinte des discriminations auditives et/ou visuelles, confusions de sons ou de graphies qui en découlent, difficultés de gestion de l'ordre des lettres, atteintes parfois différenciées des voies de lecture et d'orthographe, difficultés de mémorisation de l'orthographe lexicale et/ou grammaticale, difficultés de repérage spatio-temporels...
La gestion mentale nous donne des outils supplémentaires d'analyse des causes de ces difficultés particulières, mais également des causes de la réussite de certaines épreuves lorsqu'il y a hétérogénéité des performances au sein du bilan. L'analyse, avec le patient, de ses processus mentaux conscients lorsqu'il écrit, nous permettra d'établir un profil cognitif.
2. Approfondir le diagnostic et sélectionner des moyens thérapeutiques adaptés aux exigences cognitives du sujet.
Le diagnostic posé, nous avons, avec le patient, en partie accès à ce qu'il fait mentalement de façon consciente lors de certaines tâches déficientes. Nous nous appuyons aussi sur des processus efficients dans d'autres situations, pour ajuster nos propositions thérapeutiques à son fonctionnement singulier. La gestion mentale permet donc, en plus des moyens thérapeutiques liés essentiellement au diagnostic, d'ajuster la rééducation aux modalités particulières de fonctionnement cognitif conscient du patient. Ceci permet une augmentation de l'efficience de la rééducation.
Objectifs spécifiques:
1. Vérifier, compléter et approfondir ses connaissances théoriques en gestion mentale.
Les connaissances théoriques de la gestion mentale sont complétées et approfondies en lien avec la rééducation de l'orthographe, notamment le dialogue cognitif avec le patient lors du bilan et en rééducation, l'analyse du geste d'attention et du geste de mémorisation, l'accompagnement rééducatif sur ces gestes...
2. Analyser les processus cognitifs conscients lors de l'apprentissage de la lecture et de la lecture experte, en lien avec les modèles neuropsychologiques de fonctionnement de la lecture et de l'orthographe.
Les modèles dits à double voies, proposent un chemin cognitif différent pour le phonologique et le lexical. L'atteinte spécifique d'une seule voie ou des deux entraîne des profils cliniques différents, les difficultés peuvent concerner davantage l'orthographe phonologique ou lexicale. La gestion mentale explicite la partie consciente de ces différents chemins possibles chez le scripteur expert, chez l'apprenti scripteur et chez le sujet dysorthographique.
3. Approfondir un diagnostic lors du bilan orthophonique de troubles du langage écrit en établissant un profil cognitif du patient.
Lors du bilan orthophonique, à partir des éléments diagnostics des troubles du langage écrit, nous engageons plusieurs dialogues cognitifs permettant de comprendre les particularités cognitives du patient, comme les natures privilégiées des ses évoqués, les contenus de réalité, de codes ou de liens logiques utilisés, le déroulé des gestes d'attention, de mémorisation, de compréhension ou de réflexion en fonction des différentes tâches à effectuer etc.
4. Choisir et adapter des outils de rééducation de l'orthographe phonétique, lexicale et grammaticale en fonction du profil cognitif du patient.
La gestion mentale n’est pas une méthode. Elle ne se substitue pas aux traitements des troubles du langage écrit mais elle les enrichit. L’analyse des fonctionnements cognitifs conscients des patients permet d’ajuster les méthodes de rééducation orthophonique utilisées, aux particularités du sujet que dévoile la gestion mentale.
Les éléments diagnostics d'une part, et les informations données par le profil cognitif d'autre part, vont nous permettre de mieux choisir nos outils rééducatifs, de les modifier éventuellement, de les utiliser en nous adaptant au fonctionnement conscient de notre patient. Il s'agira par exemple de séparer les perceptions visuelles et auditives et de les présenter au patient dans un ordre qui lui convient cognitivement.
On pourra aussi lors du bilan, détecter des difficultés de discrimination auditive, un déficit visuo attentionnel, des confusions auditives ou visuelles etc.
Si deux patients présentent un trouble de la discrimination auditive, la gestion mentale peut permettre, grâce au dialogue cognitif, d'identifier chez le premier des évocations de nature principalement visuelle avec des contenus portant sur réalité (paramètre 1- ou sur les liens logiques (paramètre
3- et peu de contenus portant sur les codes (paramètre
2-. Les évocations de nature auditive seront quasi absentes quel que soit le paramètre, en particulier le paramètre 2 qui est présent chez les sujets ayant une bonne discrimination auditive.
Chez le second patient, on pourra par exemple observer des évocations visuelles en paramètre 2 (code) et des évocations auditives en paramètre 1 (intonation, rythme, mélodie) mais pas d’évocation auditive en paramètre 2 comme chez le premier sujet.
Pour le premier patient, on pourra s’appuyer sur des entrées perceptives visuelles de réalité pour l’amener à pouvoir évoquer dans le prolongement des perceptions auditives verbales. Pour le second patient, cette façon de procéder risque d’être peu efficace. On pourra par contre s’appuyer sur des éléments rythmiques, mélodiques et éventuellement de code visuel, pour amener à des évocations verbales permettant les discriminations auditives.
Au fil de la rééducation, ce processus d’analyse et d’adaptation des techniques de rééducation se poursuit pour s’ajuster au plus près à la réalité du patient et de ses difficultés.
5. Analyser le geste de mémorisation au sein de la rééducation de l'orthographe.
Le geste de mémorisation est nécessaire à la mémorisation de l'orthographe lexicale, difficulté souvent importante de nos patients. La gestion mentale permet au patient d'expliciter des contenus facilement mémorisables ou d'autres qui le sont très difficilement. Nous pouvons construire des propositions thérapeutiques adaptées au patient pour améliorer l'efficacité de son geste de mémorisation. Nous nous appuyons par exemple sur des entrées perceptives que le sujet privilégie quand il mémorise (auditive, tactile, kinesthésique, visuelle...), nous l'accompagnons ainsi dans une geste conscient des différentes étapes nécessaires à la mémorisation: objectif, mise en projet, attention avec sélection d'indices, envoi dans un imaginaire d'avenir, réitérations dans le temps, restitution.
6. Mener un dialogue cognitif avec un patient dans le cadre de la rééducation de l'orthographe grammaticale.
L'orthographe grammaticale passe par une compréhension de différentes particularités morphologiques du français: les accords, la conjugaison, les homophones grammaticaux.... Le dialogue cognitif permet au patient de prendre conscience de ce qui se passe mentalement quand il écrit:
A t-il des évoqués concernant les différents niveaux de l'orthographe grammaticales?
Fait-il des liens avec la mémorisation de conjugaisons, de règles d'accord?
Le sens du texte écrit peut il l'aider pour orthographier? etc.
Ce même dialogue cognitif permet au rééducateur un accompagnement thérapeutique ajusté au fonctionnement du patient:
Qu'est-ce que le patient peut convoquer ou pas mentalement lorsqu'il écrit?
Quelles sont les natures évocatives qu'il utilise?
Quelles types de perception peuvent l'aider à évoquer? etc.
7. Analyser le geste d'attention au sein de la rééducation du l'orthographe
Lors du bilan orthophonique, on pourra parfois constater, en sus des difficultés orthographiques sous dictée, des erreurs également en copie de mots ou de phrases. La rééducation de ce geste d'attention peut permettre au patient de prendre conscience de possibles causes de ses erreurs. Les évoqués conscients visuels et/ou auditifs des mots écrits peuvent être manquants ou lacunaires. Si telle est la raison (des difficultés d'attention en copie peuvent avoir d'autres causes), la gestion mentale permettra un accompagnement du patient sur l'enrichissement et la précision des évoqués conscients pouvant améliorer la copie. Ce type de rééducation a des répercussions sur l'orthographe sous dictée et sur l'orthographe spontanée car elle permet un travail précis des évoqués phonologiques et lexicaux conscients.
La gestion mentale apporte à la rééducation de l'orthographe des outils d'analyse dont la finesse enrichit le diagnostic, la compréhension du fonctionnement cognitif du patient et l'adaptation des méthodes rééducatives à sa disposition.