Il y a environ 50 ans, la psychiatrie s’est séparée de la neurologie en France et dans l’Union européenne alors limitée à 6 membres ; beaucoup considèrent cet acte comme fondateur de notre discipline qu’il contribuait à libérer d’un réductionnisme neurologique trop simpliste pour rendre compte des réalités cliniques et des déterminants psychosociaux des troubles psychiatriques. Cette séparation était globalement bien reçue par les professionnels de la psychiatrie même si une minorité d’entre eux mettait en avant le risque de renforcer une dérive dualiste renouvelant à leurs yeux l’erreur de Descartes. La roue a tourné et le développement spectaculaire des méthodes d’exploration scientifiques et des résultats qu’elles ont permis d’obtenir à conduit à ce que, bien au-delà de leur lien privilégiés avec la neurologie, les neurosciences prennent pour objet des dimensions phénoménologiques ou psychodynamiques qui étaient jusque-là considérées comme l’apanage des psychiatres voir des psychanalystes (voir par exemple les nouveaux champs que représentent les neurosciences sociales ou la neuropsychanalyse). En remettant en cause les lignes de clivages qui se justifiaient autrefois, ces remaniements ont complexifié et nuancé les rapports entre psychiatrie et neurosciences en nous obligeant à préciser d’avantage leurs champs respectifs. Ce colloque le fera sans méconnaître que si les progrès réalisés dans le domaine de la pathologie mentale ont été particulièrement importants ces dernières années, leurs apports à la pratique clinique quotidienne paraissent encore bien limités, se réduisant souvent à justifier a posteriori des pratiques déjà développées sur des bases souvent intuitives ou de bon sens sur la base que constituent avant l’observation, l’écoute et l’expérimentation pratique. Un écart se creuse progressivement entre le praticien et le chercheur : question de méthode, d’objet, d’enjeux ou de rapport à la connaissance ?